l'enfant qui ne voulait pas venir
Ce midi je flâne un peu dans la bibliothèque de mon entreprise, un livre capte mon attention (les livres sont capables de vous attrapper comme une prédateur se jette sur sa proie, vous et personne d'autre ce jour-là) : L'enfant éternel de Philippe Forest. Je me souviens avoir lu un article dans un magazine féminin voici plus d'un mois à son sujet, je feuillette le livre qui confirme l'information que mon cerveau a enregistré et soigneusement conservé à mon insu : il parle de sa petite fille morte d'un cancer...je suis happée par quelques phrases qui me mettent aussitôt les larmes aux yeux, je referme et je m'éloigne "non je ne PEUX pas lire ça", je reviens, reprends le livre, le repose encore, m'éloigne un peu plus..."il faut que je le prenne", "non je ne pourrais pas lire ce livre", je pars à l'autre bout de la bibliothèque, des titres m'accrochent "l'enfant volé", "l'enfant ceci" "l'enfant cela", par quatre fois le mot enfant qui saisit mon regard...je choisis à la va-vite un livre sur la psychologie, repasse devant le Forest, le prend, le repose, me dis que je dois essayer de le lire, balaye encore quelques pages magnifiques et réussis à partir sans le prendre en essayant non sans mal de refouler les larmes qui me montent aux yeux...de retour au bureau, j'essaie de me concentrer sur un dossier, puis un autre, décide de faire une recherche philippe forest sur internet, lit quelques critiques et avis de lecteurs, me revoilà redevenir cramoisie et je sens de nouveau la respiration qui s'accélère, le sang qui bat aux tempes et les larmes qui reviennent...je me dirige vite vers les toilettes (je vous rappelle je suis sur un open space) , là je réalise qu'hier soir contrairement aux mois précédents je n'ai pas versé une larme quand la perspective d'être enceinte s'est un peu plus éloignée, pas une larme quand cette nuit je me suis réveillée en sursaut avec la certitude que je n'aurai pas d'autre enfant, pas une larme quand ce matin je me suis dit pour la centième fois qu'à 2 ou 3 ans ç'aurait été possible, si je n'avais pas autant attendu...